Couverture du journal du 20/04/2024 Le nouveau magazine

Le peigne : toujours sur les dents

L’activité de l’entreprise Thomas Liorac est une rareté : perdue dans la campagne du haut Périgord, elle fabrique des peignes en corne… de bovins africains.

« Je ne pourrai plus jamais revenir au plastique ! » Voilà un avis de client qui fait chaud au cœur de Grégoire et Marguerite Villedey, qui ont repris une fabrication 100 % naturelle : celle du peigne en corne ariégeois qui a connu son heure de gloire jusqu’aux années 1930, employant 1 500 ouvriers, avant de céder face aux assauts du tout plastique. Le couple a déménagé cette année à Saint-Martin-le-Pin, pour raisons familiales et y a installé l’atelier créé en 2011 dans les Pyrénées pour relancer cette activité oubliée. Sous la marque Thomas Liorac, le duo a d’abord commercialisé les modèles fabriqués par un artisan local puis ils ont voulu maîtriser l’ensemble, dans un souci d’autonomie. Les deux derniers fabricants français ne souhaitant pas prendre d’apprentis, le couple a lancé une étude technique et acquis des machines. Marguerite, qui fut bibliothécaire durant 15 ans, s’est autoformée pendant 18 mois jusqu’à la maîtrise complète de ce savoir-faire en perdition. En 2014, reconversion réussie : elle a appris quasi empiriquement les gestes traditionnels auxquels tous deux ont su ajouter un sens esthétique plus contemporain et des outils techniques de nature à faire évoluer la fabrication. 14 étapes sont nécessaires à la confection de ce type de peigne, certaines entièrement manuelles, comme le sciage des cornes ou le profilage à la meule, d’autres mécanisées comme la découpe des contours ou le ponçage. La corne, matière naturelle, rend chaque pièce unique, avec une couleur qui dépend de la bête qui la porte. Les races bovines d’Afrique subsaharienne possèdent de longues et solides cornes parfaites pour cet usage. Antistatique et respectueux de la gaine du cheveu, ce matériau constitue l’essentiel de cet accessoire… si l’on peut dire.

24 modèles différents

Monsieur commercialise et expédie, maîtrise l’informatique et la gestion. Madame assure la conception et la fabrication de A à Z. Ensemble, ils ont introduit la découpe numérique et le pressage thermorégulé, ce qui permet de gagner en productivité, en fiabilité et en créativité. En plus de cette innovation, la diffusion prend un tour nouveau entre les mains de Grégoire avec la vente par correspondance et le e-commerce sans intermédiaire. Cette distribution directe dégage des marges tout en proposant des prix abordables à la vente. Le contact avec la clientèle permet de valoriser ce métier, il est aussi possible de personnaliser les peignes par gravure. La gamme d’excellence s’étend désormais sur 24 modèles différents pour offrir le meilleur à tous les types de cheveux, et l’entreprise s’est ouverte à la commercialisation de produits voisins, comme les brosses en soie naturelle ou les shampoings bio. Thomas Liorac a obtenu le label Entreprise du patrimoine vivant en mars 2017, gage de préservation d’une empreinte traditionnelle. Le parti pris haut de gamme convient parfaitement à cet objet solide et naturel, qui peut accompagner quelqu’un toute une vie, blotti dans une poche ou un coin de sac. Innovation, vente directe, design et large choix s’ajoutent donc aux qualités ancestrales du peigne en corne, totalement écologique. Avec un savoir-faire de vieille tradition française, une matière première venue d’Afrique, une modernisation par la découpe numérique autant que la vente en ligne jusqu’au bout du monde, Thomas Liorac a réalisé 176 000 euros de chiffre d’affaires l’an passé et pourrait aller bien au-delà… Mais cette aventure signe aussi une volonté familiale de rester dans ce format. Un choix de qualité qui passe aussi par celle de vie.

Suzanne BOIREAU-TARTARAT

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